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20 décembre 2012

Pussemange

Mais pourquoi donc Néchin ?

Hein ?

Néchin !

Si l’Avinable m’avait consulté, je lui aurais suggéré Pussemange.

Vous non plus, vous ne connaissez pas Pussemange ?

Cette charmante bourgade adossée à la frontière entre France et Belgique ?

Un minuscule village que je m’aurais fait une joie d’indiquer à Gégé.

Une bourgade qui n’est d’ailleurs plus un village à part entière.

Où l’anonymat est garanti.

C’est là que mon grand-père Edouard envoyait le gamin que je fus acheter le tabac belge dont il faisait un usage modéré.

A bicyclette, s’il vous plaît.

Edouard me gratifiait des quelques francs d’alors, lesquels me permettaient d’acquérir mes réserves de chocolat belge.

Oui, pardon, j’ai omis de préciser que Pussemange est ardennaise.

Belge, mais ardennaise.

Vous quittez Charleville.

Vous grimpez la côte d’Aiglemont.

Vous traversez le village d’Aiglemont puis vous prenez la route de Neufmanil.

(Neufmanil est le village natal de feue ma mère, Marguerite Toupet)

Arrivé(s) à Neufmanil, vous prenez la direction de Gespunsart.

(Peut-être, et si vous prenez le temps, découvrirez-vous ici ou là une plaque en fonte proclamant : « A nos bienfaiteurs Toupet/Rose », ma grand-mère maternelle étant une Rose, je me concède cette brève autant que narcissique incidence !)

Vous remontez la vallée de la Goutelle (tout bon pour Gégé, ça, la Goutelle !) charmante et innocente rivière qui s’en va se dissoudre dans la Meuse du côté de Nouzonville.

A Gespunsart, un panneau vous indiquera les directions conjointes de la frontière et de Pussemange.

Quelques coups de pédale et vous découvrirez ce qui fut le poste frontière, là où un douanier d’autrefois, bien calé sur sa chaise, relevait la barrière devant le jeune cycliste et lui lançait toujours la même phrase : « Voilà le commissionnaire de son grand-père ! ».

Pussemange.

Son tabac.

Son chocolat.

Ses frites.

Eh oui ! le cornet de frites qui permettait à celui qui se rêvait alors comme un nouveau Bobet, un nouveau Geminiani, de reconstituer son capital énergétique avant de se soumettre au trajet du retour.

Les sacoches de la bicyclette remplies de tabac et de chocolat.

(Les belgiens du val de Semoy cultivaient du tabac, une culture qui n’avait point cours de l’autre côté de la frontière, chez nous les ardennais de France.)

Nouveau passage devant le poste frontière.

Le douanier français relevait la barrière et lançait : « Ah ! Voilà mon contrebandier ! »

(Le douanier belge, lui, laissait sa barrière ouverte et somnolait dans sa cahute….)

Je ne doute pas qu’un demi-siècle plus tard, Pussemange soit toujours Pussemange.

Son tabac.

Son chocolat.

Ses frites.

Et ses bières.

Dont la prodigieuse Orval, présentée dans des calices d’un demi-litre.

Quoi de plus normal après tout, puisque cette bière-là était fabriquée par des trappistes !

J’insinue dans ma narration ces quelques détails afin de vous laisser comprendre que Gégé révèle une fois encore son mauvais goût en s’exilant à Néchin.

Puisque le bon goût émane de Pussemange.

De par la vertu de ses pussemangeois et de ses pussemangeoises.

Gens paisibles, plutôt bons vivants.

Capables de détourner Gégé de ses triviales avinations et de le convertir aux trappisteries de là-bas.

Accompagnées de quelques frites (cuites à la graisse de bœuf) mais pas de moules.

Des trappisteries dont Gégé se serait délivré non pas dans un flacon plastifié, mais sur un tas de fumier.

Certains choix sont esthétiquement et culturellement révélateurs.

Gégé a opté pour la Belgique de l’insignifiance, fusse-t-elle francophone.

Ce néo néchinois à demi ouzbèk, voire même tchétchène !

Au bout du compte, non !

Pussemange ne méritait pas ce grippe-sou !

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