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Comédies
16 novembre 2020

(re)J+17

comédie ml

 

 

 

 

 

 

 

Que s’est-il-passé ?
J’y comprends rien
Y avait une ville
Et y a plus rien

Y a plus rien qu’un désert
De gravats de poussière
Qu’un silence à hurler
À la place ou il y avait
Une ville qui battait
Comme un cœur prodigieux
Une fille dont les yeux
Etaient pleins du soleil de mai
Mon Dieu, mon Dieu
Faites que ce soit
Un mauvais rêve

Réveillez-moi
Réveillez-moi
Réveillez-moi

Réveillé, je l’étais, lorsque je me rendis en cette librairie conquise de haute lutte par un assez médiocre mais fortuné ex-dessinateur en architecture.

Quelques livres à récupérer, livres préalablement commandés par l’intermédiaire de ma machinerie électroniquante (une machinerie de bureau, je le précise, devenue depuis un quart de siècle le substitut du stylo qui se gavait d’encre Waterman).

Place de la Comédie.

C’est vrai : y’avait une ville et y a plus rien.

Rien qui vive, rien de ce qui permettait aux animaux humains d’entretenir des liens de solidarité, d’amitié, de fraternité.

Du béton et du bitume qui s’effritent.

Quelques fantômes masqués qui s’évitent.

Pis qu’un désert.

Jusqu’aux plantes qui dans leurs pots se recroquevillent indignées qu’elles sont du peu de considération que les fantômes leur accordent.

Déjà suicidaires.

Contre la volonté du nouveau Bourgmestre dont l’arrosoir municipalisé repose au pied des Trois Grâces.

Y’avait une ville et y’a plus rien.

Rien de ce qui rappelle le souvenir des présences humaines.

Une preuve irréfutable : lors de ma brève incursion, je n’ai vu ni l’ombre d’un milichien ni celle d’un gestapiste.

Un silence à hurler là où autrefois la ville chantait des polyphonies.

Y’avait une ville et y’a plus rien.

Le pire étant que ceux qui l’observent, qui l’auscultent, qui sont censés la soigner, ceux-là ont déserté et se terrent au profond des parkings.

Un pigeon chie sur le sein gauche d’une des Trois Grâces.

Les regards des quelques fantômes emmasqués s’arriment aux pavés que le vent du nord vient tout juste de sécher.

Y’avait une ville et y’a plus rien.

Rien de ce qui donne l’envie de vivre.

Un silence à hurler.

De peur.

Les ricanements muets des virus.

Ils ont déjà accompli la mission qui leur fut confiée par les Maîtres du monde : les animaux humains ne forment plus une société ni même un troupeau.

Ils bousent dans leurs braies.

Y’avait une ville et y’a plus rien.

Rien d’autre que les remugles de la peur.

Laquelle assure au Monarque et à ses Chambellans une impunité qui constitue l’ultime outrage fait à la démocratie.

Y’avait une ville et y’a plus rien.

Plus rien de ce qui fut l’humanité, celle dont avait rêvé Jaurès, le tribun socialiste dont je ne me demande même plus pourquoi il fut assassiné le 31 juillet 1914.

Jaurès figé dans la pierre au centre d’une place pis que morte.

 

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