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12 février 2014

Chrestins

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L’imprévu des dominicalités.

Point d’agenouillement, non.

La chapelle des Grassouillets consacrée à saint Vincent n’accueille pas les mécréants.

Mais des amis, des proches, des gens de confiance qui m’installent dans une torpédo, leur torpédo.

Pour un périple qui, si vous michelinez correctement, de méandre en méandre, m’emmena des confins des gorges de l’Ardèche jusqu’à une Bourgade qui s’insupporte en ce moment de l’hiver des crises nerveuses de la Drôme.

La rivière Drôme, affluent du Rhône, fleuve majeur gonflé de toute sa suffisance.

Donc la Bourgade.

Dont le mur d’escalade s’entrevoit de très loin.

Presque aussi loin que cela.

Ce qui fait une longue  distance pour un vieillard impotent.

Un mur d’escalade déguisé en ruine moyenâgeuse.

Imposante au demeurant, la ruine.

Si imposante que le visiteur comprend la dévotion que portent les indigènes à l’édile bâtisseur. 

Ces chants sacrés que fredonnaient les foules qui arpentaient les travées de ce qui prit ce dimanche les apparences d’un parc des expositions…

« Hervé… Hervé… Hervé Marie Iton…. »

Sur la musique d’un certain Ave Maria cathodiquement traduisible en latin d’Eglise.

Transporté, je le fus donc.

Jusqu’à ce parc des expositions où la laine, celle des moutons tondus bien entendu, faisait la fête.

Une fête de riches.

La pelote y est en effet hors de prix.

Surtout pour le très modeste retraité que je suis.

J’avais esquissé le projet d’en acquérir trois ou quatre, quantité nécessaire au tricotage des cinq suspensoirs que je suis dans l’obligation de renouveler chaque année.

Le billet de cinq euros que j’avais prévu d’investir dans cet achat ne suffisant pas pour l’acquisition d’une seule pelote, j’ai renoncé.

(J’ai toutefois fini par en trouver une douzaine – de suspensoirs -, dans une brocante proche de la Bourgade, une belle et confortable douzaine qui provenait de stocks abandonnés en 1963 par l’intendance de la Légion Etrangère. Pour quatre euros. Une douzaine qui devrait, en principe, couvrir mes besoins pour les deux prochaines années. Si tant est que je sois en mesure de garder bon pied bon œil durant ce laps de temps et que les mites n’aient pas opéré de manière sournoise dans les replis de ces charmantes choses-la.)

A midi tapant, je déjeunai frugalement d’un morceau de boudin et d’un amoncellement de frites même pas belges mais dopées à la mayonnaise yankee.

Tandis qu’autour de moi les foules badaudantes chantaient à l’unisson : « Hervé… Hervé… Hervé Marie Iton… »

Troupeau réactionnaire, enculté sous les ordres d’un intégriste goupillonnant.

Dressant vers le ciel un poing vengeur à chaque passage de la chorale (réduite à quatre unités) de l’amicale béatement verdouilleuse qui farandolait entre les stands tout en entonnant sur un vieil air populaire une ritournelle qu’il me fut aisé de retenir : « Mariton, tontaine et tonton… »

« Mariton, tontaine et tonton… »

Dans un enclos à peine isolé, une femelle mouton mérinos se livrait à d’éhontées manœuvres de subornation destinées à séduire un alpaga contraint depuis de longues années à de douloureux exercices solitaires.

Tandis que dans le même enclos deux lapins angoras enseignaient à trois enfants de chœur les gymnastiques simplifiées communes à leur espèce.

« Mariton, tontaine et tonton… »

La foi qui soulève les montagnes.

Pour m’en convaincre, il m’a suffi de me tourner vers le Levant : la Bourgade s’est engoncée dans des replis que surplombe le Vercors.

Un haut lieu de la Résistance, le Vercors.

La Vraie.

L’Authentique.

Etrangère aux frénétiques élans d’un ancien monarque réduit désormais aux fonctions d’imprésario d’une chanteuse aphone.

« Mariton, tontaine et tonton… »

La foule hagarde des chrestins déambulait, indifférente aux fulgurantes fornications des bestioles embrigadées pour la défense de la belle cause de la laine.

La laine qui se vend à un prix si peu conforme aux maigres ressources d’un vieillard retraitouillé.

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