COMEDIE (119)

Mais que sont-ils donc ?

D’aucuns prétendent qu’ils sont des militants.

Du parti de François le Débonnaire, bien entendu.

J’esclaffe !

Des passe-plats, peut-être, de rang très inférieur, ça oui.

Mais surtout pas des militants, c’est-à-dire de gens dévoués à une cause estimable portée par des idées et des projets eux-mêmes estimables.

A Montpellier, la guerre des chefs tourne au dérisoire, à l’insignifiant, au pitoyable.

J’esclaffe tout en grinçant des dents, car il y va tout de même du devenir de quelques centaines de milliers de personnes (l’avenir de la ville de Montpellier étant intimement lié au devenir de l’Agglomération).

Donc, et si j’ai bien compris le contenu de mes plus récentes lectures, deux ploutocrates solférinistes convoquent en la bonne ville de Marseille, donc pas très loin des bureaux de Mémé Guérini (qui est toujours socialiste, lui), le Tout Petit Bonhomme dit l’Illimitable et Phiphi la Sauterelle.

Rien qu’eux deux.

Alors qu’il y a deux autres candidats déclarés et que le parti socialiste héraultais s’est doté d’un chef démocratiquement élu.

L’Illimitable et Phiphi, le petit doigt sur la couture du pantalon, répondent à la convocation des deux ploutocrates solférinistes.

« C’est-y lui ou c’est-y moi ? »

Les deux turlupinables qui s’estiment à ce point légitimes autant qu’irremplaçables ont dû vivre des heures tourmentouilleuses avant leur entrevue avec les missi dominici.

L’Illimitable répétant septante et trois fois la leçon concoctée par ses communicants.

Phiphi tournant et retournant équerre et compas au-dessus d’un plein bol de marc de café décaféiné.

Pensez donc !

Atteindre afin au trône !

Celui qu’occupa pendant des lustres l’Immense Disparu.

Dont l’Illimitable fut, durant des lustres, le diligent cireur de pompes.

Dont Phiphi fut le colmateur d’improbables caries.

Les deux missi dominici, si proches géographiquement des espaces où Mémé Guérini avait commis tant de turpitudes, dictèrent aux impétrants leurs conditions.

Lesquelles eurent le malheur de déplaire à Phiphi qui, illico, claqua la porte du bouge malodorant où il avait été convoqué à l’insu de son plein gré.

Mais les militants me direz-vous ?

C’est là où le bât blesse : ils n’existent pas ou, plus exactement, leurs opinions n’intéressent aucun de ces décideurs.

Tout se joue dans le secret le plus absolu.

Magouilles et compagnie.

Tripatouillages.

Connivences.

Copinages.

Cooptations.

Mais rien de ce qui relève du débat d’idées, d’une confrontation sur la base de projets.

Rien de rien.

Rien d’autres que deux prétendants adoubés par les ploutocrates solférinistes, deux prétendus leaders qui ambitionnent de se positionner sur la plus haute marche.

Tout en haut du tas de fumier.

Les militants ?

Il leur sera simplement demandé d’avaliser un jour ou l’autre un choix qui n’a évidemment rien de politique, un choix qui résulte de la seule tambouille électoraliste.

Lamentable !

Indigne de gens qui prétendent incarner la gauche.

L’aventure marseillaise des deux pèlerins qui tournèrent le dos à Saint Jacques de Compostelle, cette aventure-là m’a au moins convaincu d’une exigence morale : n’apporter ni à l’un ni à l’autre mon suffrage d’homme de gauche si par malheur pour la belle ville de Montpellier l’un ou l’autre de ces deux-là se voyait nanti de la responsabilité de porter les couleurs de la gauche lors des élections municipales de 2014.

Quant aux militants passe-plats, je ne leur souhaite qu’un prompt et urgentissime réveil.

Qu’ils reprennent le pouvoir dans ce qui est censé leur appartenir : leur parti.

Qu’ils éliminent les scories, personnages formatés sous la férule de l’Immense Disparu.

Qu’ils me fassent rêver un peu en débattant avec les citoyens d’un projet tout plein de belle humanité.

Puis qu’ils désignent, au sein de la jeune génération, celle ou celui qui n’aura pas, accrochées à ses basques, les séquelles d’un passé désormais forclos.