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Comédies
8 mai 2014

Commémoration

Ils parlaient haut et fort.

Ils furent.

Dans des combats qui, paraît-il, rendit son honneur à la France.

Bardés de médailles.

Les mains agrippées à leur drapeau tricolore pour se tenir debout résister aux cahots du tram.

Chacun son drapeau.

Fiers comme qui mena contre les cohortes nazies l’une ou l’autre de ces opérations destinées, durant les derniers mois de la guerre, à saboter les lignes de chemin de fer.

Les terroristes d’alors, selon la terminologie répétée conjointement par les sbires du Vieux Maréchal et ceux du Führer.

L’un de mes trois compagnons de voyage fut cheminot.

Je suppose donc qu’il fut un acteur de la Bataille du Rail, celle que célébra René Clément dans un film que Gabriel, mon papa (et donc votre arrière grand-père), me fit fréquenter une bonne dizaine de fois en ces temps si lointains de ma quasi innocence.

Mes trois compagnons de voyage se rendaient à la cérémonie commémorative de ce 8 mai 1945 dont je ne sais toujours pas s’il signifia la défaite des nazis ou la victoire des Alliés.

Ils parlaient haut et fort de leurs prouesses.

Sous le regard émervouillé d’une très vieille dame qui revivait par anciens combattants interposés d’exaltants souvenirs de sa belle jeunesse.

Lorsque le tram commença à ralentir sa course pataude à la périphérie de la place de la Comédie, nous nous levâmes de concert, la très vieille dame, les trois anciens combattants et moi-même qui jamais ne combattit.

Je me penchai vers le plus proche des porteurs de drapeaux.

Un brave homme, j’en suis certain.

Je lui murmurai quelques mots qui l’interrogèrent sur un mode auquel il ne s’attendait pas.

« 8 mai 1945 ? Cette date vous rappelle-t-elle d’autres événements ? »

Il hésita, tout autant qu’hésitèrent ses deux compagnons.

Que peut-on, dans un état aussi démocratique que le nôtre, commémorer un 8 mai, sinon la commune victoire sur le nazisme ?

Oui, mais voilà, ce même 8 mai 1945 débuta à Sétif, en Algérie, une tuerie perpétrée par nombre de ces militaires qui n’avaient pas eu le temps de se réadapter aux exigences républicaines.

La soldatesque massacra des milliers et des milliers de ces pauvres gens qui bien que résidant dans des départements dits français ne disposèrent jamais des privilèges de la citoyenneté.

De pauvres gens qui en ces journées où les plus « évoluées » des sociétés humaines pensaient en avoir fini avec la barbarie s’étaient crus autorisés à revendiquer l’indépendance du pays qui était effectivement le leur : l’Algérie.

J’écris ces quelques phrases pour que vous ne restiez pas, vous, mes petits-enfants, dans l’état d’ignorance qui fut ce matin du 8 mai 2014 celui des trois anciens combattants.

J’écris ces quelques phrases pour que vous n’ignoriez pas qu’au moment même où les Forces du Bien l’emportaient sur les Forces du Mal, au nom de cette France que l’on vous somme d’aimer, d’ignobles salauds se livrèrent à d’effroyables massacres.

J’écris ces quelques phrases pour que vous sachiez que le pays dans lequel le hasard vous fit naître se conjuguèrent et se conjuguent encore les Forces du Bien et les Forces du Mal.

Avec l’espoir que vous cheminerez aux côtés des femmes et des hommes qui, dans ce pays endolori par ses contradictions, incarnent les Forces du Bien.

 

Pace è Salute !

 

 

A l’intention de Mathias, Lison, Zoé, Pedro, Timéo, Laura, Ana.

 

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