VOEUX
L’an nouveau, paraît-il.
Dont je sais, à force d’avoir trop vécu, qu’il ne sera que la morne continuation de ceux qui le précédèrent.
Je veux dire dans le vivre ensemble, dans le res publica.
Dans ce que détruisent dans un même élan dévastateur Foutriquet 1° et ses obligés, chantres d’une religion qui n’en finit plus de confiner l’humain dans sa seule animalité.
J’aimerais en ces temps de formulation des vœux faire miens ceux que Brel exprima en janvier 1968.
« Je vous souhaite
des rêves à n’en plus finir
et l’envie furieuse
d’en réaliser quelques-uns
Je vous souhaite
d’aimer ce qu’il faut aimer
et d’oublier ce qu’il faut oublier
Je vous souhaite
des passions
Je vous souhaite
des silences
Je vous souhaite
des chants d’oiseau au réveil
et des rires d’enfants
Je vous souhaite
de résister à l’enlisement
à l’indifférence
aux vertus négatives
de notre époque
Je vous souhaite
surtout
d’être vous »
Je sais, parce que j’ai vécu, que ces vœux-là, dans ce monde si cruel et si violent, relèvent, pour tant d’êtres humains, de l’inaccessible.
Que c’est pour eux que point il faut abdiquer.
Que je n’efface pas les mots de Brel de ma mémoire.
Qu’il m’advient en ce jour de la formulation de les adosser aux vers d’Aragon.
Et de vous les murmurer.
"Du peu de mots d’aimer j’ai peine
Qui fait que la phrase me faut
Je ne sais rien voir que mes veines
Et m’est la parole inhumaine
Comme blessé le blé la faux
Du peu de mots d’aimer j’ai doute
De ce qu’est l’amour exprimé
Je suis le mendiant des routes
Personne ma chanson n’écoute
N’entend le peu de mots d’aimer
Du peu de mots toujours les mêmes
Qui font semblables les amants
Et plus encore les poèmes
A rougir de dire je t’aime
Comment se contenter comment
Du peu de mots d’aimer que faire
Battez les cartes des nuées
Le jeu du ciel ou de l’enfer
A vivre ou mourir ne diffère
Les mots sont des oiseaux tués »
PACE E SALUTE