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17 mars 2016

Très Sainte Eglise

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Voici que j’exprime à qui de droit mon infinie gratitude.

A mon Papa, feu Gabriel Blanchemanche.

Rétrospectivement.

Puisque les faits se déroulèrent à la toute fin des années quarante de l’autre siècle (ou au tout début des années cinquante).

Donc avec tout plein d’omissions, de reconstitutions aléatoires, de manquements à la vérité historique, d’interprétations abusives.

Mais dans l’absolue sincérité du ressenti (plus que du vécu, ma mémoire s’obstinant à ne restituer ce qui lui sert dans l’écriture de ma modeste légende).

Charleville.

La demeure familiale d’où, du fond du jardin, l’on surplombait la Meuse.

Indolente en ce méandre où j’ai effectué sous le regard attentif et bienveillant de Juliette, feue mon aïeule, mes premières baignades estivales. 

Un après-midi d’une indéterminable saison.

La salle à manger.

Marguerite Toupet, feue ma mère, conversait avec le curé de la paroisse.

Prêtre bedonnant et ensoutané (dont le nom m’échappe) sur les genoux duquel je suis assis.

Feue ma mère entretenait des liens étroits avec la Calotte.

Marguerite Toupet déposa sur la table recouverte d’une belle nappe blanche immaculée deux tasses qui reposaient chacune sur ce que j’appelle aujourd’hui et de manière fort triviale une soucoupe.

Face à l’homme de dieu, elle avait également installé un verre à liqueur.

Un seul verre à liqueur.

Et, à quelques centimètres de ce verre, une bouteille contenant un liquide translucide en partie dissimulé à mon regard par une étiquette sur laquelle, à l’aide d’une plume sergent-major et de quelques gouttes d’encre violette, feu Edouard, mon aïeul, avait consigné en lettres majuscules cette information : « MIRABELLE  1927 ».

Mon petit cul d’enfantelet reposait sur les robustes cuisses du curé.

Près de trois-quarts de siècle plus tard, mon fondement est toujours en mesure d’en témoigner : il ne se produisit apparemment rien de répréhensible en ces instants où l’autorisation me fut accordée par le saint homme de tremper un morceau de sucre dans le café que Marguerite Toupet venait de lui servir.

Un café torréfié maison.

Donc un délice.

Qui aurait dû préluder à un second délice : un second morceau de sucre trempé celui-là dans le verre préalablement rempli du liquide translucide.

Sauf que les évènements prirent subitement un cours contraire à mes rêves gourmands.

Survint inopinément celui que ni ma mère ni le prêtre n’avaient convié à ce pieux séminaire : Gabriel Blanchemanche, feu mon père.

Lequel Gabriel Blanchemanche ne fréquentait pas la Calotte.

Je fus brutalement arraché par ce père indigne des bras de l’homme de dieu, privé sans ménagement de la douce chaleur qui émanait des cuisses et du bas ventre du saint homme sur lesquels mon petit cul d’enfantelet avait trouvé refuge.

J’entendis plus que des cris : des vociférations.

Peut-être même quelques injures.

Sous la table en vieux chêne d’Ardenne, là où je trouvai alors un refuge bien évidemment précaire, j’entrevis une soutane qu’une main épaisse et velue retroussait.

Puis j’entendis comme une cavalcade, les semelles de chaussures sacerdotales raisonnant sur le plancher puis sur le carrelage de la cuisine.

Une fuite éperdue.

Et tout aussitôt les gémissements, les plaintes, les pleurs de Marguerite Toupet, feue ma mère.

Les phrases abruptes énoncées par mon père.

Phrases bien évidemment effacées de ma mémoire, mais dont j’ai aujourd’hui encore la certitude qu’elles signifiaient à ma mère des « Plus jamais ça ! ».

Pour autant qu’il m’en souvienne, la « MIRABELLE 1927 » ne mélangea pas ses délicats arômes avec les remugles de choux de Bruxelles et de saucisson à l’ail dont s’était empiffré le curé lors de son déjeuner.

L’enfantelet, quant à lui, n’anticipa pas ce jour-là sur les phases ordinaires de l’initiation à la sexualité.

C’est du moins ce que je me prends à penser en ce 17 mars 2016, depuis que sont parvenus jusqu’à moi les récits des turpitudes perpétrés par de très saints vaticancaneurs, ces êtres en quête perpétuelle de la pureté et de la sainteté, obligés de camoufler les imprévisibles conséquences de leurs érectionnements, puisqu’ils sont dotés, eux aussi, de cette Chose aux incontrôlables expansions et aux jaillissements somme toute beaucoup moins désagréables que le prétendent les Ecritures.

D’où l’expression tardive mais sincère de ma gratitude.

A l’égard de Feu mon Papa.

D’où l’expression constante de ma vindicte à l’encontre de la curetaille, de la calotte, des vaticancaneurs, des génuflexionnistes, des bénédictionnistes attitrés, des overdosés de l’hostie, des buveurs de sang, des bonimenteurs, des conteurs de sornettes, des marchands d’illusions, des charlatans, des médicastres des âmes crédules.

Le Barbarin me fait froid dans le dos.

Le Barbarin, c’est l’inhumanité.

Le Barbarin, c’est le vieux cléricalisme totalitaire.

Le Barbarin, c’est la preuve hélas toujours vivante que son Eglise demeure, à l’instar de toutes les autres églises, l’instrument d’asservissement des êtres humains.

Et qu’elle sait toujours être celui de leurs infinies souffrances.

 

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