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18 mars 2015

Galère

HPIM7825

 

 

 

 

 

 

 

 

J’aime découvrir tous les messages que des correspondants, presque toujours anonymes, greffent sur mon blog à mes chroniquouillettes.

Injurieux, parfois.

Condescendants aussi.

Tel celui que j’ai découvert ce matin et qui, à l’instar de tous les autres, ne sera jamais publié.

« Que vas-tu foutre dans cette galère ? »

J’apprécie au plus haut point cette façon de m’interroger, une façon qui me laisse supposer que son auteur exprime comme un vague intérêt pour le devenir d’un vieil homme qui prend le risque de s’exposer à la vindicte des Puissants.

En l’occurrence, la galère en question n’est rien d’autre que le radeau de la Méduse, rafiot en perdition sur lequel s’agglutinent celles et ceux qui tentent de survivre à la tempête provoquée par les décisions prises en matière de Culture par le Grand Métropolitain.

(Un Grand Métropolitain dont je viens de lire, en l’espace de deux jours, deux interviews : l’une du style « lèche-bottes, dans le torche-cul gratuit, l’autre, beaucoup plus distanciée et donc critique, publiée dans l’excellent « artdeville ».)

Pourquoi donc en effet accompagner les perdants, les laissés pour compte, les infréquentables, les indigents et subir en leur compagnie ces coups de tabac qui, et selon toute logique, auraient dû me conduire à un prudent repli ?

Pourquoi donc, si ce n’est une certaine et haute idée de ce que devraient être les politiques culturelles des collectivités territoriales et en particulier celles des cités concomitantes où je réside, la ville de Montpellier et sa Métropole hypertrophiable ?

J’entends bien ce dont tente de me convaincre mon non-interlocuteur : à ton âge, tu as bien mieux à faire qu’à te démener pour tenter de sauver ce qui peut l’être encore du côté de gens qui, au bout du compte, et pour reprendre un mot figurant dans le dit message, ne sont que des « losers ».

C’est vrai.

J’ai allégrement franchi le cap de la septantaine.

Je m’abreuve autant que je le peux aux sources de la Culture, de toutes les Cultures que m’offrent mes environnements, les plus proches comme les plus lointains.

Les livres en premier lieu, puisque la littérature constitue, et depuis ma plus tendre enfance, mon fond de commerce, le seul en fait auquel je ne puisse renoncer.

Mais aussi le cinéma.

Mais aussi le théâtre.

Mais aussi la danse.

Mais aussi la musique.

Mais aussi les « arts », qu’ils soient contemporains ou qu’ils ne le soient pas.

J’eus l’avantage (peut-être aussi le privilège ?) de vivre de longs moments de mon existence parmi des femmes et des hommes de Culture.

J’eus l’avantage (mais peut-être pas le privilège ?) d’accompagner des hommes politiques dans la réalisation de leurs très improbables ambitions culturelles.

Il fut un temps déjà lointain où Jack Ralite m’initia, dans une vision très aragonienne du rassemblement de toutes les sensibilités, au combat censé contraindre l’Etat à accorder 1% de ses ressources au budget du Ministère des Affaires Culturelles.

Au-delà de l’arithmétique, la revendication visait alors à ce que la Culture devienne une grande cause nationale, une cause nationale prioritaire, qui conditionnerait l’avenir de toutes les couches sociales et, en tout premier lieu, des plus défavorisées.

Cette expérience m’a convaincu qu’il n’était rien de plus vil, de plus dégradant pour un élu que de préconiser l’émergence d’une Culture dite « populaire », opposable à une Culture dite « élitiste ».

La Culture est une.

Indivisible.

La Culture, c’est ce qui confère à l’être humain la capacité de comprendre le monde dans lequel il vit, de s’élever, d’atteindre à l’autre, de reconnaître et d’accepter l’autre, de donner libre cours aussi bien à ses émotions qu’à son imagination, d’être pleinement humain.

Si donc je suis monté à bord de la « galère », si j’y occupe ma modeste place, si j’exprime mes colères, mon incompréhension, mon incrédulité, mon refus de l’anéantissement du travail accompli, c’est que j’entends continuer à défendre une action culturelle qui ne soit pas soumise aux diktats des hommes politiques.

Je n’accorde à aucun d’entre eux, et en tout premier lieu au Grand Métropolitain, le droit d’abîmer, de détruire, d’anéantir ce que des femmes et des hommes ont mis tant d’années à construire.

Si je ne leur concède, si je ne lui concède pas ce droit, c’est que j’entends user de toutes mes prérogatives de citoyen.

Soit donc d’exprimer à tout moment mon opposition à toutes les formes de tyrannie, de clamer mon indignation face à tous les abus de pouvoir.

Tant je crois que la Culture peut seule créer le lien.

La Culture à travers la globalité de ses acteurs, donc de ses sensibilités, donc de ses talents.

Avec la claire conscience que je ne me bats pas pour la défense de mes intérêts particuliers ni même en faveur de celles et ceux que le Grand Métropolitain prétend éliminer du paysage montpelliérain, celui qu’il cherche à s’approprier, mais pour que cette Culture-là devienne l’élément nutritif d’un corps social qui ne survivra pas à tous les maux qui l’affectent et qui le détournent vers le sinistre refuge que prétendent lui offrir les Marinasseries sans qu’Elle soit au cœur de toutes les préoccupations.

C’est parce que je crois à l’Intelligence, que j’aspire aux Lumières que je m’engage dans ce combat-là.

 

A Voce Rivolta !

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