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20 novembre 2014

Nacunoeil

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Ne voir le monde que d’un seul œil (provisoirement) n’en modifie pas les perspectives.

Ou si peu.

J’ai confié à un éminent praticien le soin de retirer de mon œil gauche un objet incongru qu’un autre éminent praticien y installa voilà plus de dix-sept ans.

L’opération ne dura guère plus de trente minutes.

L’objet, une barrette d’environ deux centimètres de long avait longtemps servi à contenir une rétine défaillante.

Avec le temps, elle avait durci, provoquant peu à peu de récurrentes puis régulières douleurs.

L’intervention chirurgicale, rendue nécessaire en raison des risques que le corps étranger faisait craindre pour ma cornée, fut une réussite.

Je me familiarise dans l’immédiat avec ses désagréments.

Trois jours après que l’acte médical eût été perpétré par l’éminent praticien, je ne présente plus la moindre ressemblance morphologique avec certain Borgne Bas Breton, ressemblance éventuelle qui fut à la source de mes plus vives et incontrôlables angoisses préopératoires.

Le volume de la paupière s’est à ce point réduit que je parviens enfin à ouvrir cet œil, ce qui m’autorise à rédiger, non sans difficulté, cette insignifiante chroniquouillette.

Je larmoie tant et plus.

De fulgurantes douleurs me laissent craindre le pire pour toute la partie gauche de ma dentition ainsi que pour mes facultés auditives (toujours du côté gauche).

Mon Référant m’a toutefois rassuré : il ne s’agirait que des effets secondaires de l’anesthésie locale réalisée par un autre éminent praticien qui usa de gouttes d’un collyre destiné à insensibiliser l’œil et son proche environnement sensible.

(Je dois d’ailleurs reconnaître que leurs premiers effets secondaires ne manquèrent ni de charme ni d’agrément : durant la quasi-totalité de l’intervention, l’œil incisé fut tout de même en mesure d’observer d’intenses projections lumineuses vivement colorées de rouge, de jaune, de vert, de bleu, de violet, dans une fulgurance qui me laissa penser que j’avais au préalable fait un usage immodéré de substances illicites.)

Je ne gloserai pas sur le caractère semi-industriel des activités de la clinique qui m’accueillit pour cette délicate intervention.

Ses patrons manifestent, c’est indéniable, une volonté sans faille de rentabiliser l’outil de travail.

Jusque dans les détails les plus triviaux : la « collation », servie aussitôt après l’opération et constituée de quatre éléments, une tasse d’un infâme brouet appelé café, un quart de baguette d’un pain spongieux, quelques grammes de matière grasse insipide et une compote de pomme.

Si je ne puis oublier la douceur de la main de l’infirmière (anonyme) qui plusieurs fois effleura la mienne durant l’intervention, je garde un souvenir détestable du personnel d’accueil, lequel paraît incapable de comprendre le stress et les angoisses de celui qui fut convoqué à une heure matinale avant de s’entendre dire qu’il devait se résigner à attendre que la machinerie bureaucratique veuille bien se mettre en marche.

Mais que valent ces petits soucis-là si je les compare à ceux qui s’accumulent sur les frêles épaules de papy Dassault, obsolescent capitaliste dont les aumônes versées à quelques électeurs dépassent mon entendement.

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