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Comédies
5 août 2014

Chroniques corses 2014 (5)

Mardi 17 juin

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La Joffrinette titre : « La gauche en péril ». Cette gauche n’étant en aucun cas assimilable à un chef d’œuvre, il n’est à mes yeux aucun raison valable pour tirer le signal d’alarme. D’autant moins que les cris d’orfraies suggérés à ses « collaborateurs » par l’encore nouveau directeur de la rédaction de Libé se circonscriraient au cœur de minuscules territoires, ceux où évoluent quelques dizaines de députés « socialistes » auxquels, en minorant leurs critiques, les néo-joffrineux reprochent par anticipation de vouloir commettre l’acte sacrilège, celui de ne pas voter, fin juin, le collectif budgétaire. Alors même que le Grand Chambellan dispose d’une batterie d’arguments les mieux à même de faire rentrer dans le rang les brebis égarées. Lolo a donc grand tort de s’évertuer à transfuser vers ses lecteurs résiduels (dont je suis) des inquiétudes de toute évidence infondées. Et puis, et j’accepte tout de même d’envisager le pire, si cette gauche-là devait incessamment sous peu crever la gueule ouverte, ce serait une excellente chose pour ce pays qui n’est plus qu’une nation asservie à la clique des Médéfieux, clique à laquelle le parti qui n’est plus du tout socialiste ne sert que de roue de secours.

(Merveilleuse Joffrinette dont les correcteurs laissèrent passer cet embryon de phrase : « Un peu plus d’un TGV est prévu ce matin… » ! Ce qui ne se commente évidemment pas.)

Le Batavouilleux, quoiqu’il advienne, a d’ores et déjà accompli une prouesse, celle qui consiste à anéantir l’antédiluvienne machinerie politique qui avait su résister, bon an mal an, à un siècle et demi de cahots, de turbulences, d’égarements. Ce qu’il avait préconisé dès 1985 dans son « Changer la gauche », il le réalise avec le concours de marionnettes dont l’appétence pour le larbinisme le dispute à la médiocrité. Je pense en cet instant à Aurore Filipetti, qui autrefois eut l’amabilité de me libeller au dos d’une carte postale (expédiée depuis Courchevel ?) quelques remerciements convenus qui firent suite à un billet dans lequel j’avais accordé à son premier et unique roman, « La mort de la classe ouvrière », une mention que je qualifierais aujourd’hui « d’honorable ». Cette transvasée, fille d’un militant communiste, sidérurgiste et immigré italien, passée par les rangs des Verdouilleux, s’est mise au service des politicards du désenchantement, copiant tous leurs tics, se parant à la façon d’une fée carabosseuse, exhibant l’effarant vide de sa pensée avec ce tant d’innocence qui fait, dans d’autres milieux, tout le charme des douairières.

Ici, sur l’Île, Popaul s’évertue à trouver des circonstances atténuantes à Nanar, le Grand Chef des Argousins. Ne sont-ils pas en effet, l’un et l’autre, des sortes de cousins ? « Il (Nanar) était en service commandé », précise Popaul. Une phrase qui laisse supposer que Nanard n’exprima pas en Corse le fond de sa pensée mais qu’il y serina celle de son commanditaire, l’Infâme Grand Chambellan, Manu le Fourbe. Cétipa plus commode, Popaul, de recourir à ce genre d’argument un tantinet frelaté plutôt que de s’en prendre à une machinerie qui n’intègre que celles et surtout ceux qui se sont adaptés aux formatages imposés par les Maîtres de la pensée unique ? Soit donc des individus désormais incapables de comprendre qu’ils œuvrent au service d’un appareil à vocation totalitaire. Un appareil qui ignore, rejette, contraint au silence toutes les voix discordantes au sein de cette gauche qui n’a plus de « plurielle » que les apparences.

Morse-Taquin m’alerte sur le contenu du courrier que les officiers de la marine marchande CGT ont adressé à Frédo, le ministre des transports. Je résume. Un rafiot de Corsica Ferries a, au cours d’une manœuvre ordinaire, raclé les bas fonds du port d’Isula Rossa. Le dit rafiot n’en a pas moins repris sa route (maritime) vers le continent. Ce n’est que quatre rotations plus tard, et suite à la découverte d’eau dans les cales à combustible, que la coque sera enfin examinée. Bilan de cet examen : un enfoncement de la coque de quatre centimètres de large sur cinquante mètres de long. Quelques milliers de passagers furent accueillis sur ce rafiot en quasi détresse, puisqu’il n’était alors d’autre urgence que de garantir les dividendes des actionnaires de Corsica Ferries. Sans que ces passagers n’aient jamais été informés de l’état de précarité du navire censé les conduire à bon port. Le Médéfieux qui dirige cette société (laquelle ne se soumet pas à la législation française puisqu’elle « bat » pavillon italien) développe dans les colonnes de Morse-Taquin un argumentaire fallacieux : ces salauds d’officiers CGT se livrent à « une surenchère de manipulation médiatique » afin de faire oublier les malheurs de la SNCM. Pour moi qui, en une seule circonstance, fus contraint sous le pavillon de Corsica Ferries, je tiens à préciser à ce Médéfieux notoire que je fus atterré par le mode de fonctionnement de son navire. Non respect des horaires. Vidange puis remplissage immédiat des cales assurés par des personnels hyper excités. Accueil par des personnels parlant si peu le français qu’aucun échange excédant les quinze secondes ne fut envisageable. Aucun espace où trouver un peu de calme pour qui n’avait pas, au prix fort, réservé une cabine. Taris exhorbitendus des produits vendus à bord (y compris ce qui vient de (re)devenir la « Joffrinette »). Repas indignes d’un pénitencier de sous-préfecture mais dont les prix équivalaient, ou peu s’en faut, à ceux pratiqués dans les cantines que fréquentent les puissants. Insistance à pousser le passager désœuvré vers les lieux de turpitude où l’on se déleste de ses euros superflus. Corsica Ferries surexploite ses personnels qui ne disposent, de toute évidence, d’aucune arme de défense collective. Corsica Ferries symbolise le capitalisme mortifère, celui de l’enrichissement par les recours aux moyens les plus ignobles. Y compris donc la mise en péril de la vie de quelques milliers de passagers.

 

 

 

 

Mercredi 18 juin

 

L’incessante cavalcade des orages accrochés aux sommets tout proche. Les roulements désordonnés du tonnerre m’ont extirpé de ma sieste, me privant peut-être de quelques rêves subliminaux.

L’issue fatale est imminente. La SNCM n’est déjà plus qu’un cadavre. Ainsi en ont décidé les canailles auxquels un état crapuleux a confié la gestion d’un service public. Oui, d’ignobles canailles dont l’action ne s’est jamais fixé d’autre perspective que d’accumuler les profits dont se repaissent vautours et chacals. Rendre service à un territoire et à ses habitants fut le cadet de leurs soucis. TRANDEV devenu l’actionnaire principal de la SNCM de par le fait du Prince a depuis lors bénéficié du soutien complice du nouveau Monarque. Monarque menteur, Monarque tricheur, Monarque dissimulateur, laissant à ses Chambellans le soin de berner et les personnels de la compagnie et les clients/usagers de celle-ci. Les engagements et les promesses ne furent que des leurres destinés à faire gagner du temps à Celui qui anéantit la gauche (l’objectif que poursuit ce naufrageur depuis trente ans !) afin que les échéances électorales puissent être abordées sans que de nouvelles tempêtes ne viennent ternir un peu plus sa si affligeante image. Il ne faut en effet pas s’y tromper : dans cette affaire dont le dénouement est prévisible, si les hommes de main ont accompli les basses œuvres, ce sont bien les hommes d’Etat qui leur ont concédé les moyens de perpétrer ce qui est assimilable à un crime.

Un crime contre la volonté populaire. Un crime contre la démocratie. Le crime de forfaiture, dans la mesure où un médiocre farfadet formaté par la machinerie étatique prend seul la décision de détruire un outil nécessaire au bien être collectif. Un tueur que la mise à mort de quelques milliers d’individus indiffère : les salariés de la SNCM et leurs familles. Un tueur qui place sous la tutelle des affairistes, des vautours et des chacals le bien être du Peuple Corse. Le seuil de l’indignité est outrepassé. Pour ma part, je ne m’interroge pas, ainsi que le fait le secrétaire général de la CGT, pour savoir « si Mrs Cuvillier, Montebourg et Valls sont complices ou bien victimes, comme nous, des patrons voyous ». Le frivole Montebourgeois et les deux autres larrons de connivence avec ces patrons qui sont infiniment pires que des voyous. Il revient au Peuple Souverain d’instruire contre ces crapules affiliées le procès en infamie et trahison qu’elles méritent.

J’ajoute enfin que la pitoyable mise en garde formulée par le président de l’office corse des transports (Paul-Marie Bartoli) et publiée dans Morse-Taquin relève de la provocation : « Nous espérons que le bon sens l’emportera. Les syndicats ne doivent pas pénaliser leur seul et unique client qu’est la Corse. » Le bon sens aurait voulu que l’Etat continuât à assumer l’ensemble des missions de service public. En les offrant aux affairistes, aux vautours et aux chacals, il a créé les conditions d’une mort programmée de la SNCM, un service public qui ne se devait pas d’être rentable, malgré les normes en vigueur dans l’espace capitalistique. La riposte des salariés de la compagnie est donc plus que légitime : elle est morale.

Reste enfin aux Corses à s’interroger sur le bien-fondé d’une politique qui vise à doter l’Île d’une quasi mono-économie, celle qui repose sur le tourisme. Une économie dont l’extrême fragilité induira très vite d’autres catastrophes, infiniment plus douloureuses que celles consécutives à la seule disparition de la SNCM.

 

 

 

 

Jeudi 19 juin

 

En ses bureaux, Pierre-Marie, maire du village, s’attelle à décrypter des courriers préfectoraux (du moins, je le suppose). La stentorieuse secrétaire hausse le ton, confrontée à ce qu’elle estime être l’incrédulité de l’Edile. Le dialogue se déroule sous la fenêtre de la chambre où je m’enclos pour une sieste réparatrice. Je suis, à l’insu de mon plein gré, le témoin auditif d’une leçon de droit administratif. L’Edile tente de contenir les élans verbaux de la secrétaire, laquelle toutefois n’en démord pas et maintient que sa lecture à elle est conforme et à l’esprit et à la lettre de la missive. Ce que Pierre-Marie finit par admettre en s’imposant un long silence que de ma position d’observateur j’ai trouvé plutôt éloquent.

Il est de trop rares journées au cours desquelles la promenade favorise les rencontres avec les plus proches amis. En premier lieu, Marie-Jo, guère empressée de gagner sa librairie à Isula Rossa. Puis Eugène qui bavarde devant un petit noir avec l’une de ses « vieilles » connaissances, restaurateur comme lui, mais installé à Calvi, et cycliste de surcroit (mais piètre guitariste selon ses confidences, à l’inverse d’Eugène dont le répertoire est conséquent). Puis Jean-François, en cavale vers Bastia. Et enfin Huguette et Antoine auxquels je voue une profonde affection. Antoine, de retour de la bergerie, là où en cette saison les brebis ne « produisent » presque plus de lait, mais qui réclament tout de même des soins quotidiens. Petit Bout s’en ira (re)découvrir la bergerie à l’heure crépusculaire. En effet, les intempestives explications apportées au Premier Magistrat par sa secrétaire ne l’ont pas tirée de son sommeil.

La « Jofrinette » révèle que les amis des amis du Monarque déchu par le Peuple Souverain tripatouillèrent tant et plus durant cette campagne électorale au terme de laquelle la droite couilles molles succéda à la droite hystérique. Je n’en ai jamais douté. Des tripatouillages, bien entendu. Depuis que je suis en âge d’observer le déroulement des affaires politiques, depuis qu’il me fut donné d’ouïr les péroraisons du Général aux bras si longs, ce vieux comploteur qui reconquit le pouvoir avec le soutien de la soldatesque, tout est affaire de corruption. A une (très grosse) nuance près : les sommes volatilisées en 2012 sont infiniment plus conséquentes qu’en 1958. Mais les odeurs que dégagent tous ces trafics présentent bien des analogies. Pestilentielles, elles fournissent d’utiles éléments d’appréciation sur l’état de décomposition du système. Sous la haute autorité de Nicolas l’Atrabilaire, cette décomposition s’est accélérée à telle vitesse que cela en dépassa l’entendement. François le Freluquet se contente pour l’heure de consigner dans son carnet intime les effets secondaires des coups portés à celui qu’il estime toujours être son rival par quelques juges teigneux qui manifestent une sorte d’acharnement, qu’ils qualifient de républicain, à l’encontre de combinards suspectés d’avoir usé et abusé de l’argent public. Cette antépénultième affaire met en évidence l’urgence d’en finir avec la monarchiante raie publique.

 

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