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16 mai 2014

Monarchiures

L’homme qu’évoque ci-dessous Thomas Bernhard fut durant de longues années en Autriche le chancelier fédéral.

Un socialiste.

J’y trouve pour ma part quelque(s) ressemblance(s) avec l’individu qui fut propulsé sur le Trône de la raie publique franchouillarde voilà tout juste deux ans.

Je ne résiste donc pas à commémorer cet insignifiant anniversaire en reproduisant le texte que Thomas Bernhard rédigea en 1979 à l’intention du quotidien hambourgeois Die Zeit.

 

 

 Depuis de nombreuses années, notre chancelier fédéral Kreisky prétend, à chaque occasion qui lui paraît idoine, qu’il est sans doute le meilleur connaisseur actuel de Musil, car il croit, ce faisant, prouver son haut niveau intellectuel, alors qu’il ne fait que prouver par là qu’il est un petit-bourgeois. Dans votre supplément Zeit-Magazin, il convoque une énième fois Musil, qui n’a plus aucun moyen de se défendre contre la passion sans fin, exaltée et tout à fait dans l’air du temps que lui voue ce vaniteux lecteur. Naturellement cette obsession musilienne du fantaisiste chevronné que notre chancelier fédéral peut se targuer d’être devenu depuis près de dix ans ne nuit pas à Musil lui-même, car Musil reste Musil, mais – funeste conséquence – Kreisky n’est plus Kreisky depuis fort longtemps déjà. Plus personne ne rit des numéros de notre chef de gouvernement, car tout le monde sait ce qu’ils coûtent. Cet homme bigrement rusé, ce véritable pur-sang de la politique, ne joue plus aujourd’hui que le rôle du clown d’Etat vieillissant, imbu de sa personne, une sorte de Charlie Rivel émouvant mais cher payé, énamouré de ses propres tours de passe-passe, qui faisaient mouche autrefois, mais qui sont désormais plus qu’éculés ; la scène où il évolue est celle de la politique, qui heureusement ne lui est réservée qu’ici en Autriche, ce pays bonhomme et traîtreusement libéral. Depuis des années, il est ce chancelier auquel on est abonné et qu’on aime par habitude, celui qui maîtrise le plus d’artifices, ne sert ni ne nuit à personne, une sorte de Tito haut-autrichien aigre-doux et valseur, dont tout le monde craint la disparition. Comme si le soleil s’éteindrait avec Kreisky ! Dans son feuilleton politique, dont le scénario est un peu moins malin qu’il ne l’est lui-même, le chancelier perpétuel tresse des louanges à l’Autriche à grand renfort d’œillades complices, comme pour vanter les produits de sa petite boutique personnelle avec les mots et l’état d’esprit du sympathique commis de commerce qui reprend les affaires dans des circonstances qui font qu’il n’y a plus de vrai patron, et présente tout cela comme une grande et bonne nouvelle. Madré comme il est, cet épicier de la politique passe sous silence la réalité de la situation. Le camelot Kreisky en véritable Nestroy, c’est-à-dire en figure de la littérature mondiale, bien que probablement et malheureusement pas de l’histoire mondiale, se vante d’être à la tête de la boutique la plus fantastique qui soit, alors qu’il sait pertinemment qu’elle est en faillite et que ses rayons sont vides. Même au fond du dernier tiroir tout en bas, on ne trouve plus une once de socialisme originel et authentique. Aujourd’hui, celui qui depuis une longue décennie déjà a été presque autant choyé par sa clientèle que notre Heinz Conrads° national, trône sur ses invendus, à l’ombre de la cheminée de Hundertwasser.

 

° Chansonnier et animateur de télévision autrichien, Heinz Conrads (1913-1986) était un spécialiste du Wienerlied, répertoire de chansons viennoises particulièrement populaires au cours de la seconde moitié du XIX° siècle.

 

 

 

Voilà un texte édifiant. Un texte qui devrait nous inciter à nous débarrasser le plus vite possible de ce François, Monarque fossoyeur des ultimes avatars du socialisme.

(Ce texte est publié par l'honorable maison Gallimard dans un recueil intitulé "Sur les traces de la vérité".)

thomas

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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