COMEDIE (129)

Pour sûr, Phiphi se retrouve dans la panade.

Son mentor parisien, l’homme qui se situe à l’extrême extrême-droite du Parti Socialiste, s’évertue à mettre la bride sur le cou de ses proches, ceux que tenteraient les aventures fragmentationnistes.

Ce qui est le cas de Phiphi.

Dauphin autoproclamé de l’Immense Disparu, mais récusé par les sbires et les mercenaires qui oeuvrent dans l’ombre de l’Illimitable.

Le Grand Chef des Argousins qui sans aucun doute sondouille dans tous les recoins de la France profonde n’est plus en droit de se voiler la face : les élections municipales de mars prochain vaudront au Parti Socialiste de perdre moult de ses bastions.

Même si la conquête de la bonne ville de Marseille, grâce au précieux maintien au second tour des candidats de la droite extrême, pourrait peut-être permettre aux Solfériniens de sauver la face.

Il ne fait toutefois guère de doute que nombre d’édiles solfériniens se verront contraints de remettre dans les tiroirs naphtalanisées leurs si avenantes sous-ventrières tricolores.

Donc le Grand Chef des Argousins se voit dans l’incapacité d’accorder sa caution à ceux dont les ambitions furent contrariées par des votes militants ou citoyens, par ceux qui, à l’instar de Phiphi, s’estiment aujourd’hui floués et trahis.

Pauvre Phiphi.

Ses vallsaisons à trois, à cent et même à mille temps furent-elles vaines ?

Ses féaux devraient être fixés au cours des prochains jours.

Le réalisme devrait toutefois prévaloir.

Fut-il quasiment sibérien.

De son côté, le Ratatinable reconnaît enfin et fort tardivement quelques vertus à l’Immense Disparu.

Opération des elfes ou des anges ?

A moins qu’un pèlerinage à Puylaurens ne l’ait conduit à se recueillir sur le tombeau de l’homme auquel il voua une haine atrabilaire.

Un pot de chrysanthèmes roses déposé sur le marbre ?

Un os à moelle suçoté au plus profond d’une nuit d’automne ?

La vérité se révélant à ce sexagénaire destiné à une très prochaine retraite ?

Ou la peur de se voir dépassé par un peu plus à droite que lui, qui est pourtant, lui, tellement à droite.

Ah, l’iconographie !

En ces temps de précampagne électorale, les édiles n’éditorialisent plus.

Mais ils ne s’interdisent pas d’apparaître sur les clichés quadricomiques.

Tel l’Illimitable, dans la parution de novembre de son mensuel de propagande.

Une image m’interpelle.

Celle qui fut (accidentellement ?) positionnée au bas de la page 30.

Un format modeste.

Mais qui cependant permet d’identifier l’Illimitable (dixit le « Président de Montpellier Agglomération ») qui pose aux côtés de Miss.Tic.

(Oui, Miss.Tic, la « street-artiste ». Miss.Tic dont j’apprécie tout particulièrement les slogans provocateurs qui accompagnent ses oeuvres…. Miss.Tic qui vient de se voir confier la décoration des rames de la future ligne 5.)

Ils posent.

Miss.Tic et l’Illimitable.

Le photographe vient de leur indiquer : « Le petit oiseau va sortir ! ».

Leurs regards se sont aussitôt tournés vers l’objectif.

L’image est née.

Le cliché banal sera publiable.

Le cliché banal est publié.

Un petit détail m’intrigue.

Observez bien l’Illimitable.

Vous remarquerez alors qu’il porte une chemise bleu immaculable.

Soit donc la chose de base de l’uniforme dont se parent les notables.

Regardez d’un peu plus près le col de la dite chemise.

Sa partie droite est en tout point conforme aux exigences protocolaires.

Mais sa partie gauche s’abandonne à ce que nous, dans les Ardennes, appelons une rebicaison.

Une timide mais inopportune rebicaison.

Que semble confirmer celle du veston.

Qui pourrait bien trahir l’intense émotion, celle qui fait vibrer l’Illimitable dont l’épaule gauche paraît s’appuyer sur l’épaule droite de la street-artiste ».

Artiste qui vient peut-être de lui susurrer à l’oreille (gauche) : « Je suis la voyelle du mot voyou ».