Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Comédies
18 juillet 2013

Chroniques corses 5

VENDREDI 21 JUIN

 

Les traces de Danièle Casanova. En Balagne. Personnalité attachante rencontrée dans trois de mes récentes lectures : la biographie consacrée à Aragon par Pierre Juquin, le poème dans lequel le Poète rendit hommage à celle qui mourut dans un camp de concentration après avoir été torturée dans des geôles où officiaient de concert gestapistes et collaborateurs, et puis l’ouvrage que je viens de refermer, celui dans lequel Michel Politzer chemine douloureusement dans la (re)découverte de son père, le philosophe Georges Politzer (torturé lui aussi puis fusillé par les nazis au Mont Valérien). Donc Danièle Casanova. Femme et corse. Militante communiste. Sur les pas de laquelle j’essaie de cheminer du côté d’Occhiatana et de Belgodère. Cette année. L’an prochain. Sans trop tarder cependant : mon de temps de vie « créatrice » est mesuré.

De même qu’il m’est interdit de tarder dans le travail de tri et réhabilitation des photographies (NB et surtout diapositives), ces centaines de clichés qui témoignent de et sur la vie du Village. J’avais promis à Lucien d’effectuer ce travail ; je ne l’ai accompli qu’en partie. Lucien, qui est la discrétion faite homme, ne m’interrogea pas lors de nos retrouvailles. Mais je me dois de tenir la promesse que je lui ai faite.

Mais qu’ont-ils donc à dissimuler ? Les élus de la nation. Députés et sénateurs. Qui ne doivent leur sinécure qu’à la volonté démocratiquement exprimée par le Peuple Souverain. Faut-il leur rappeler que ce Peuple-là devrait disposer du pouvoir de révoquer celles et ceux qui manqueraient à leurs engagements, à leurs promesses ? Députés et sénateurs renâclent. Députés et sénateurs prétendent limiter la « transparence » à un exercice qui ferait au préalable du citoyen un tantinet curieux un présumé coupable de divulgation publique d’informations privées. Celles qui concernent le patrimoine de ces députés et de ces sénateurs. Je résume. S’il me vient l’idée saugrenue de connaître le patrimoine du député de la circonscription où je réside, je serai dans l’obligation de me rendre en Préfecture. Là, un commis subalterne de l’Etat (Mère) consignera mes nom et prénoms ainsi qu’à n’en pas douter mes coordonnées postales (sans aucun doute sur présentation et de ma carte d’identité et d’un justificatif de domicile). Si au lendemain de la consultation de la déclaration de patrimoine de « mon » député il me vient l’envie, saugrenue elle aussi, de diffuser sur mon blog ou dans l’une ou l’autre de mes chroniquouillettes les résultats de ma quête, la justice de la raie publique sera alors en droit de me condamner, moi, le délictueux informateur, à une amende de 45 000 euros doublée d’une peine d’une année de prison ! Députés et sénateurs n’y vont donc pas avec le dos de la cuillère. En faisant planer de telles menaces, ils érigent une muraille infranchissable par le commun des mortels. Muraille dont la finalité est d’opacifier cette transparence dont notre bon Roi, François le Débonnaire, se fit le chantre lorsque l’affaire du Caca Huzac atteint à son solstice. Députés et sénateurs pataugent de plus belle dans la bouse. C’en est affligeant.

(Selon le Canard Enchaîné, François le Débonnaire, que le journal satyrique appelle « Pépère », fut informé dès la mi-décembre de la monstruosité du Caca Huzac. Mais François le Débonnaire préféra alors accorder du temps au temps et concéda à l’ancien ravaudeur de tonsures le plein bénéfice de la présomption d’innocence. Celle-là même que les Nobles Justiciers de la raie publique refusent aux supposés délinquants qui eurent, eux, la malchance de naître puis de grandir dans l’un ou l’autre des quartiers de grande infortune.)

 

 

 

 

 

SAMEDI 22 JUIN

 

Le Village. Fête de musique intimiste. Chez Eugène. Du fourneau à la guitare. Polyvalence. Après que nous ayons pris le temps d’observer la lente descente de l’astre solaire jusqu’au repli de la colline qui borde la mer et derrière laquelle il s’est enfoncé avant de disparaître dans les ultimes soubresauts de son auréole de brumes. Eugène. Jean-François. Quelques chants corses. Chants auxquels se greffèrent des chansonnettes du répertoire français. Voix imparfaites. Voix éraillées. Voix fatiguées. Mais cependant le bonheur de chanter ensemble tout en accordant quelque attention à un Culombu rouge de bonne, peut-être même d’excellente fréquentation. En milieu de soirée, P’tit Bout manifesta des velléités d’endormissement entre les bras et tout contre le giron d’Ariane. Fatigué, épuisé par ses innombrables cavalcades dans les ruelles du Village. Indifférent à cette nuit la plus courte de l’année, la première nuit de l’été.

Hormis les marins et leurs syndicats, plus personne ne se hasarde à mettre en préalable d’un débat prétendument public la question pourtant vitale du service public maritime entre la Corse et le continent. Ce qui, autrefois, se définissait par le concept de « continuité territoriale ». Le loup est entré dans la bergerie. Veolia. Dont les dirigeants calculent et recalculent les possibles et juteux profits à réaliser dès lors que la SNCM sera soumise à leur bon vouloir. C’est-à-dire lorsqu’ils seront désentravés des contraintes liées à ce service public. Alors même que la puissance publique (Etat et région) leur adresse des signaux de connivence. Remèdes classiques : destructions d’emplois, embauche d’une main d’œuvre précaire taillable et corvéable à merci, politiques tarifaires incohérentes… A l’image de ce que pratique, depuis de longues années, le concurrent direct, Corsica Ferries. Une compagnie battant pavillon italien. Sur les navires de laquelle des quasi bagnards sont soumis à l’obligation de « multifonctionnalité » pour des salaires qui échappent aux règles sociales qui prévalent en France. Féroce exploitation capitaliste d’hommes et de femmes que la misère a contraints à l’exil. A peine moins miséreux ici. Et sans que rien ne leur garantisse un quelconque avenir. Des « moins disants » sociaux qu’ignorent des touristes peu soucieux d’imaginer que dans un avenir moins lointain qu’ils ne le pensent ils pourraient connaître à leur tour des conditions d’existence analogues à celles imposées aux femmes et aux hommes à tout faire employés par la société Corsica Ferries.

Puisque j’évoque la SNCM, il m’est impossible ce ne pas mentionner le nom de celui qui en fut intronisé président de son directoire. Modémiste à Montpellier, choyé puis intronisé maire adjoint de par la grâce de l’Immense Disparu. En ces temps où Georges Frêche, visionnaire d’exception, considéra comme inéluctable l’émergence de nouvelles alliances. Soit donc un grand coup de gouvernail à droite assorti de clins d’œil appuyés aux amis du Béarniais, puisque, et toujours selon l’Immense Disparu, l’avenir politique se jouerait alors au centre. Donc Marc Dufour. Qui, à Montpellier, est le maire adjoint chargé du commerce et de l’artisanat. Mais qui, auparavant, fut le naufrageur d’une compagnie aérienne. Les capacités de cet homme-là sont appréciées chez les Médéfieux. Je ne doute pas un seul instant qu’il sera en mesure d’ajouter la SNCM à son tableau de chasse de naufrageur patenté.

 

 

 

 

 

DIMANCHE 24 JUIN

 

De l’information ! Authentique ! Au plus près d’une réalité censée faire naître l’oubli plutôt que le rêve. L’oubli d’autres réalités facteurs d’angoisses celles-là, mais aussi de peurs et parfois de colères. Les épousailles d’un coquin et d’une coquine, épousailles célébrées hier dans un village corse. Lui, célébrité parmi les célébrités gravitant autour des tréteaux de la société du spectacle. Elle, on ne sait trop quoi, ce qui est sans importance, se suffisant à elle-même, jeune, belle, lumineuse. Morse Taquin chante ces épousailles. En une. Puis dans les pages régionales. Une pleine page, s’il vous plaît. Mais il est vrai que du très beau monde s’était déplacé. De Paris et d’ailleurs. Le très beau monde qui étale son apparente réussite, exhibe sa fortune mais peine à camoufler sa vacuité.

Toujours dans Morse Taquin, mais en dernière page, Bernard Séguéla filousophe à la façon des parvenus. Son unique objectif : improviser quelques leçons de morale comportementale à ces français (et en particulier aux corses) qui désespèrent, qui ne croient plus en rien et surtout plus en ces falots personnages qui régentent les affaires du pays. Ceux-là même auxquels Séguéla dispense de précieux conseils. De simple bon sens. Ce bon sens qui est l’apanage des vieilles choses ayant quasiment atteint au stade de l’irréversibilité, c’est-à-dire l’antichambre de la mort. Des conseils que mettront en pratique, c’est évident, François et Nicolas. Tout comme les mit autrefois en pratique un autre François, François le Premier, alias Tonton, qui avait réussi le tour de force de persuader le Peuple Souverain qu’il serait le bâtisseur du nouveau socialisme. Un socialisme auquel, aujourd’hui, François le Débonnaire donne le coup de grâce après qu’il eut été si gravement défiguré par Tonton. Les sentences de Séguéla, qu’il lira non sans délectation, lui confirment qu’il navigue dans la bonne direction : celle de la soumission aux intérêts des Médéfieux. Mais au cas où il révélerait son incapacité à maintenir le cap, Nicolas le Petit, l’Irascible Trépidant, constitue l’évident recours affublé des oripeaux du Sauveur Suprême. Assagi, emmodesti, l’époux de Carla, qui a beaucoup appris au cours de ses nombreux et enrichissants voyages obtiendra du Peuple Souverain le blanc-seing  l’autorisant à s’arrimer sur le trône branlant où des monarques de pacotille gesticulent afin d’illusionner ce même Peuple sommé de croire en leurs immenses vertus et en leur dévouement à la chose publique.

Un vent fripon balaie les collines et soulève d’irrévérencieuse manière quelques robes légères. Hirondelles et martinets sont contraints au repos. Ce qui n’est que justice en ce jour du Seigneur. Bien qu’aucun curé polonais, ougandais ou bulgare n’ait officié en l’église Saint Sauveur, l’église du Village dont le clocher se réfectionne sans que dieu ni ses saints ne l’aient réclamé.

Publicité
Publicité
Commentaires
Comédies
Publicité
Archives
Newsletter
Publicité